mercredi 11 juin 2014

Bikini Dream




l'abeille tortille son dard à quelques centimètres du liquide chloré, 
imprudent insecte !
une vague provoquée par la grosse sur sa bouée submerge la bestiole
overdose d'H2O, la butineuse voit trouble
par chance une main magnanime recueille délicatement l'insecte 
shooté au chlore l'abeille titube quelques instants
avant de s'envoler, un peu groggy, vers d'autres horizons moins mouillés. 



                                           

mardi 10 juin 2014

Johnny Got His Gun

Dalton Trumbo - 1971


Le râle asséché d'un tambour blessé rythme la démarche mécanique d'une flopée de soldats décidés à en découdre ; leurs bottes s'enfoncent dans la glaise sanglante du front, écrabouillant du talon leur destinée funeste, Johnny fonce tête baissée contre le corps de cette jolie fille au regard azur, salé comme un sorbet de larmes ,transperçant les ténèbres à bord d'un train assiégé de fantômes... 
La caméra économise ses forces, en totale symbiose avec le corps déchiqueté du jeune combattant voué à l'immobilité ; au fond de la tranchée crânienne, branle-bas de combat! L'armée des rêves piétine avec splendeur souvenirs émaciés et autres pensées décharnées .. Lorsque doucement des lèvres se posent sur le torse vibrant du petit soldat de plomb, la nature reprend ses droits, envahissant sa chair de pulsations d'insectes, noyant ses membres dans les doux rayons d'un astre oublié. Le travail sur la lumière est hallucinant : jeu d'ombre et de clarté, coloration changeante, l'objectif pour unique champ de vision, témoin intransigeant de cette croisade contre l'interdiction de mourir. La jeune voix de cet enfant de guerre résonne à chaque plan, guidée par une musique onirique aux rythmes tendus, cognant ses échos furieux contre les murs de sa prison, plus seulement corporelle, tremblements de l'âme à jamais condamnée


dimanche 8 juin 2014

The Rover

David Michôd - 2014



Mon royaume pour un clébard.

 Une bastos dans le bide du jeune fou s'éclate à broyer ses entrailles, la douleur est électrique, léchant ses iris à gros coup de pelle. La silhouette, recouverte d'un ample t-shirt, capture, et ce, à chaque plan, l'haleine décomposée du vide ; le cracha fétide du temps s'accroche à ses manches, l'homme n'est plus qu'une ombre sans contour, valdinguant d'un bout à l'autre du continent, sous le souffle rancunier du dieu Chaos. Les squelettes bouillonnent, le long de ton dos la sueur dégouline, l'air a des relents d'enfer, les doigts se crispent sur les crosses, appuient sur la détente:  les guns hurlent à la mort, l'intelligence du réalisateur à capter leur allure, ce sont bien les petits détails qui dominent, pas de place pour Dame raison : des clefs, une boite de conserve, une poignée de balles, telles sont les denrées dont IL a besoin pour avancer. Survivre un peu encore, sur ce sol ravagé, avec toujours cette impression de n'être plus sur Terre : le terrain de jeu est immense, infinies sont les possibilités et la folie s'en donne à cœur joie. La voilà qui trottine, pissant allègrement sur les cadavres que l'épopée engendre, léchant doucement ses babines trouées à l'affût du moindre faux pas : libérés de toute morale les individus se blessent, à 2-3 exceptions près : et c'est là qu'enfin le film dévoile l'étendue de sa puissance : en un regard ou quelques gestes, parfois l'esquisse d'un mot, une fragile alchimie de l'âme se crée , déployant ses ailes poussière par delà l'horizon, invitant les deux nouveaux frères à tendre leurs échines vers un destin moins funeste... Fascinant de la première à la dernière seconde, The Rover se renifle, s'avale comme un coup de poing dans le claquoir.  A l'instar de Pierce à bord du 4X4 bosselé, l'on doit quitter notre condition humaine et nous muer en prédateur grondant, la gueule suintant de rage, l'oeil frémissant, rongeant les os de nos victimes jusqu'à en vomir devant l'Eternel.