mardi 25 septembre 2012

Serpico

Sidney Lumet - 1973
 La corruption, minuscule virus pernicieux, s'aventure où bon lui semble, n'hésitant pas à passer les portes des commissariats, s'immisçant dans les uniformes, infectant les belles plaques scintillantes, poussant le vice jusqu'aux abords d'institutions plus vastes. Toute la clique est gangrénée. Du simple flic en uniforme au maire grassouillet de la ville, pas un pour rattraper l'autre sauf, tiens donc, l'homme aux moustaches anarchiques, le type à la dégaine clocho-décontractée, Serpico, celui par qui la Vertu s'embrase. Flic atypique et extrêmement doué, un poil grognon, bourreau des cœurs, Lumet nous dresse avec ferveur un portrait des plus passionnants, à grand renforts de plans rapprochés bouillonnants et de mimiques, Al Pacino, irréprochable. Messie d'une droiture presque oubliée, Serpico, ne s'ouvrant pratiquement jamais aux femmes qui lui sont dévouées, compliquera sa tâche en jouant la carte de l'être impénétrable un peu trop souvent. Machoires brisées, accès de folie grandioses, face à face terrifiants, jeux de regards avec la Mort, Serpico/Lumet repoussent à maintes reprises les frontières, les franchissant sans hésiter. Au diable la prudence, à mort la corruption, buvons à l'innocence, au retour de la Raison - Yeah Man, c'te délivrance, l'honnêteté réintègre la maison.

lundi 24 septembre 2012

The Cabin in the Woods

2012 - Drew Goddard


Sous le regard globuleux du loup à la langue moite, la belle se trémousse une dernière fois avant de ... L'mec qui machouillait son tabac avec frénésie annonçait la couleur, le séjour serait pourpre et salissant, un peu comme dans un film d'horreur, 'sont sûrs d'y laisser quelques dents. Mais.. Alors que la famille zombie exhorte ses membres de terre, la plus grande Terreur s'y enfouit un peu plus, au plus profond des Enfers elle a creusé sa tanière, saluant les morts à coups de champagne, tequilaa tequilaaa, r'garde, la gamine a plus son bras! La folie, grande femme ténébreuse , est contagieuse. Tous sont atteints. Sauf ces quelques gamins sympathiques entrainés, malgré eux, dans un tourbillon d'horreur infini, manipulés telles des marionnettes usées, par ces grands salauds à la barbe bien taillée, ces patrons aux chemises impeccablement repassées ; au diable les paris, au jeu du Truth or Dare, la jeunesse l'emportera toujours.. Sauf si notre Destin n'est plus entre nos Mains..

lundi 17 septembre 2012

The Fourth Dimension

2011

The Lotus Community Workshop - Harmony Korine 


Une flopée de ploucs ahuris scande SON nom à plein poumon. Le voyageur -bidon? là n'est pas la question- s'amuse et ricane, revêtant son plus bel habit de gourou. La magie opère vite, la réunion devient un lieu 'cosy', propice à la Folie qui se prélasse, effectuant d'insolent va-et-vient, sous l'oeil avertit du vaisseau-mère, à la croisée des mondes, virtuels, imaginaires, moisis, tous y passent. Monde un peu naze, où l'ennui domine et où les relations stagnent, ambiguïté des êtres qui se déplacent en bmx, comme si toucher le sol rendait idiot, le gourou nage, s'assied, gigote, rarement se pose. 


Chronoeye - Alexy Fedorchenko 


Dans l'oeil du temps, au plus profond de sa pupille, le scientifique s'active, guidé par d'invisibles forces, désarçonné dans son raisonnement par la perte de l'être aimé, la folie ronge doucement les plans, en commençant par les coins. Table bancale, sur laquelle repose l'avenir de l'humanité, pied de chaire, dénudé, qui, de toute sa vitalité tape sur le sol feutré, pieds qui grimpent, au sommet, pieds qui se croisent dans divers espaces-temps, les mains, aussi, mains qui composent, mains qui se tordent, qui se brûlent, désirs qui s'annulent. Chronoeye raconte, avec intelligence, une vie aux axes multiples, une vie complexe, paradoxale. L'esprit du scientifique, submergé par le chagrin, tente de se hisser au sommet, implorant l'aide du créateur. La question est posée. Est-ce celui que l'on croit? La renaissance du Sentiment devient possible: le souffle de vie qui s'évade du ventre qui ondule enveloppe le vieil être maussade, le piano se couvre de poussière, le temps se fige, puis s'étire indéfiniment, pour laisser place à l'Amour, puissante entité qui s'étale, et dans tous les coeurs s'installe..

Fawns - Jan Kwiecinski 


 à la croisée des mondes, là où le temps s'est arrêté, 4 enfants dieux s'amusent, découvrant un terrain de jeu à la hauteur de leurs envies. Comme dans un rêve, on est là, sans trop savoir comment ni trop pourquoi, mais c'est pas grave, le plaisir de l'exploration et le sentiment de toute puissance avale les questions. Des chiens galeux arpentent tristement les rues tandis que sur la place centrale une voix s'éveille. Les maîtres font mains basses sur toute humanité, traînent leurs jeans troués dans les pièces les plus sombres, avalant goulûment des pavés de glucose. Le fléau ne les effraie pas, puisque ils sont Libres, ils se transforment, tour à tour : indiens - curé - chanteur, rien n'est hors limite, puisque ils sont insouciants. Mais lorsque l'un des 4, par le chasseur est piégé, l'équilibre se brise, les dieux deviennent des proies, le bac à sable s'assombrit, vite, jeune animal, sauve-toi.


mardi 11 septembre 2012

La leçon de Piano

Jane Campion - 1993


Portée par des vagues furieuses aux notes muettes, celle qui observe s'échoue en terre inconnue, entourée de son Piano et de sa fille, ultimes fragments du grand amour perdu. Du plus profond de ses grands yeux noirs, Ada - à la manière d'un métronome un peu fou- marque le décor, scrute les contours, en rythme toujours, divines portées sans fin, définissant la cadence du spectacle, cette immense pièce passionnée se joue ici et maintenant, devant son regard flou, brouillé par les souvenirs.. La confrontation avec le monde sauvage - avec la Vie - s'annonce brutale, mais, s'armant de courage et de patience, aventureuse , comme un gamin, Ada accepte le chantage, Ada se prête au jeu. D'une simple pression sur la note de Coeur , la virtuose invoque un océan de sentiments passionnés, colère, amour, désir, jalousie, haine, peine : tous se broient et aboient, aux abords de la maison en bois, où résonneront les corps, où s'uniront les êtres, où lentement le mutisme mourra.

dimanche 9 septembre 2012

Hana-Bi

Takeshi Kitano - 1997


La maladie ronge les esprits. torturés, ennuyés, déments ou égarés, tous s'affrontent et s'entre bouffent, jusqu'à n'en plus pouvoir. L'homme peintre, guidé par une puissance qui le dépasse, remplit ses toiles de tâches heureuses et tristes, flocons maussades qui tourbillonnent sur la page blanche un soir d'été. La FIN approche, la femme lâche un sourire... timide, certes, mais sincère... Les souvenirs s'égrènent un peu partout, comme autant de pétales hagards en proie à l'Inspiration des sens, la fillette fantôme rigole en courant, et c'est une ultime cabriole qui clôt la mer en mouvement..

jeudi 6 septembre 2012

Wrong

Quentin Dupieux - 2012


Wrong, comme dans le rêve halluciné du cadavre rieur, s'étire, bouge, change sa forme au gré des pensées des acteurs, au fil des envies de la caméra. (A) Dolph, ultime symbole pathétique du manque, comble le vide de par son jeu d'acteur, par lui-même. Le corps comme unique retranchement, lieu vierge qui ne sera point souillé - ni la femme, la télépathie ou la colère n'envahiront le bonhomme. Triste, peut être, mais toujours fidèle à lui même, fidèle comme à son chien. Paul, son travail, le palmier, l'amour, autant d'indices, autant de signes, l'énergumène surnage dans ce putain de cauchemar halé , sur la peau de chaque plan luit le soleil, même sous les trombes d'eau de bureau, une affichette placardée en arrière plan rappelle l'astre tout puissant. Pression généreuse sur le jouet qui couine, recherche désespérée DU monde meilleur, perte des repères, balbutiement de la pensée, Wrong parvient, par moment, à toucher du bout des pattes cet infini royaume que l'on ne peut voir.. Wrong, comme LA pizza poivron olive ananas haricot gigot gratin de homard sauce béarnaise de Jesus Organique Pizza.

mardi 4 septembre 2012

Shadows

John Cassavetes - 1959

Hey, Benny, un triste mégot s'écrase au fond de ton verre , du bout des lèvres Lelia le repêche, les hommes en costumes papotent, les ombres, avec fracas, se meuvent, le ton est posé. Des gloussements idiots des bien pensant, surgit la peine du Noir délaissé, bouillonnant d'une envie irrépressible de chanter, voix chaleureuse, rires caustiques sur fond de contre basse rugueuse, tu sens, ce vent frais, qui s'échappe de l'écran? Emmitouflé d'une veste en cuire sonore, Benny rigole, Hugh s'affole, Lelia s'autorise alors, quelques instants frivoles, l'amour? WHO DO YOU BELONG TO? aux cous des femmes lisses scintillent de coûteux colliers de perles, en arrière plan, quelques fourrures jouent à cache cache, mais le regard, notre regard s'accroche sur ces femmes qui sourient, les yeux en l'air, le teint frémissant, la peau laiteuse, attirante femelle aux lèvres boudeuses qui rougissent en un soupir..



lundi 3 septembre 2012

Gainsbourg - Vie héroïque

Joann Sfar - 2010 



Mes doigts sur le piano s'agitent, 
laisse-toi porter par mes mélodies, 
enveloppés de fumée nos corps s'unissent, 
sur ta peau d'argile ma langue glisse 

- ne t'effraie pas, danse et chante avec moi 
- Moi la grosse tête de juif débraillée, fou d'amour, ivre de révolte - 

Toi, ô femme de mes rêves, apporte-moi l'inspiration, 
la passion, 
à quatre pattes j'aboie 'belle, belle, mon petit chaton' 
C'est plus fort que moi,
je t'aime, j'aboie, 'ma belle ma belle, regarde moi'. 

Tout contre moi ton corps ondule, 
tes petites jambes rasées s'échappent d'une courte jupe,
la Javanaise me souffle ce délicat soupir alcoolisé, 
AAAh, je tremble que tu ne m'épouses, 
toujours
jolie gosse fossette, allongés sur la pelouse, 
contre ta poitrine dorée.
Je t'aime B.B

 mon nez, amoureux, s'écrase sur le piano, 
le juif insoumis ne s'endort jamais, l'esprit crépite, 
les démons se relayent, je ne peux compter que sur moi-même. 

Toi qui m'aime, qui me regarde, qui me prends tel que je suis, comprends bien une chose:
belle gosse mon coeur est fou, fou d'amour pour vous. 

Mes pas dévalent les rues pavées de la capitale, 
chuuut, écoute, 
au fond grogne l'heure du rendez-vous fatale, 
les treize coups de mon existence résonnent sous ton sourire mutin, 
je tape en rythme sur ton beau ventre plat
vos yeux, belle amie, me fixent et me possèdent, venez, on se tire de là..

samedi 1 septembre 2012

The Divide

Xavier Gens - 2012





Groggy comme après une partie de jambes en l'air arrosée de coups de poing furieux, la blatte aux allures de cafard drogué s'avance dans l'Antre des mourants, la tanière où l'on vient dépérir. La fin du monde vu par Xavier Gens aurait pu s'appeler la guerre des Sexes. La pute, la Vierge et le Soumis se lancent des regards maladifs, sous le nez du Chasseur sanglant, les lèvres mollement fermées sur son cigare puant, ricane mon vieux, ricane, la porte a été violée, utopie désuète que la votre, il est dès à présent trop tard. Le mal les ronge, la folie les étouffe, l'objectif halluciné de la caméra se faufile entre les genres, défie les cris, percute les corps -en charpies. Petit à petit les chaires se putréfient, les cheveux tombent et s'émiettent dans l'atmosphère, les globes oculaires tourbillonnent en rougissant. Sur un matelas gorgé de sang, où s'amoncellent stupre et gouttes de luxure, la fin des temps, doucement s'allonge, gamine brutale, illogique et immature, prête à tout pour faire de ces instants de trêve , un cauchemar qui dure, qui dure...